Les arbres arrivent au bassin Vauban

Livraison fluviale : Des arbres voguant au fil du Rhin

De l’embouchure du Rhin jusqu’à Strasbourg, découvrez l’histoire peu commune d’une livraison d’arbres par bateau, initiatrice d’une réflexion globale sur les filières d’approvisionnement et le transport dans les projets d’urbanisme.

Aulnes de Spaeth, peupliers blancs, chênes velus, saules pleureurs ou encore merisiers font partie des 115 arbres partis de la pépinière Ebben aux Pays-Bas pour Strasbourg et venir peupler la partie sud du quartier Citadelle. Découvrez le récit étape par étape de cette livraison fluviale pas comme les autres, fruit d’une réflexion globale sur l’approvisionnement dans un projet urbain…

Une démarche de livraison fluviale exceptionnelle

C’est l’une des rares fois où des arbres ont été livrés par bateau dans le cadre d’un projet d’aménagement urbain. A l’origine, une réflexion globale sur l’approvisionnement s’est traduite, en s’appuyant sur la boîte à outils à notre disposition dans le cadre de la commande publique, par l’insertion dans nos marchés d’une clause environnementale visant à orienter les entreprises vers le transport fluvial. Le but : réduire l’impact carbone du transport, améliorer la qualité de l’air et décongestionner les axes routiers. A l’issue de l’appel d’offres, la SPL Deux-Rives a retenu la société Thierry Muller, spécialisée en ingénierie et travaux du paysage. L’entreprise a en effet su trouver une solution adaptée aux transports des arbres en les disposant dans la cale d’une péniche pour limiter leur manutention (voir ci-dessous). Elle tira notamment partie de l’expertise acquise dans le cadre de la démarche Valozac. Elle avait alors participé, lors de ces travaux de mise en état sanitaire des sols pollués, à la mise en place du transport par péniche des terres entre les différentes platesformes, situées de part et d’autre du bassin Vauban. Cette démarche permet aujourd’hui d’éviter la circulation de 8000 camions sur 3 ans d’activité !

C’est à l’automne 2019 que la SPL Deux-Rives a choisi les arbres dans la pépinière pour leur mise en terre en mars 2020. Les 115 arbres ont ainsi parcouru 590 km en péniche. Partis le jeudi 12 mars du port de Cuijk aux Pays-Bas, ils ont rejoint la Meuse, puis, via le Canal de la Meuse au Waal, le Waal, un défluent du Rhin, et enfin, remonté le fleuve pour amarrer au Bassin Vauban le lundi 16 mars. De bonnes conditions de navigation et un niveau du Rhin suffisamment bas pour permettre l’entrée dans le bassin ont assuré une livraison en 5 jours, au lieu des six initialement prévus. Si le transport fluvial exige de s’adapter à l’eau et ses aléas, il s’affirme comme un transport efficace et écologique.

Au total, sur ce trajet de 5 jours, un calcul via l’écocalcuteur mis en place par Voies Navigables de France atteste de 330 kg équivalent carbone et 140 litres de carburant économisés par rapport à un transport en camion.

Comment préserver ces arbres de la pépinière à leur destination finale ?

Les arbres étant des êtres vivants, leur transport est bien plus sensible que le transport de marchandises inertes. Si leur bien-être n’est pas pris en compte tout au long de l’acheminement, les arbres sont mis en danger de mort. La priorité était donc de limiter les manutentions pour ne pas les fragiliser, en brisant des branches par exemple. Dans notre cas, les arbres ont été transportés en tracteur sur 2.5 km de la pépinière jusqu’au port de Cuijk, où ils ont été entreposés dans la cale d’une péniche, conditionnés dans une motte grillagée permettant d’éviter leur dessèchement. La manutention des arbres s’est faite au chargement et déchargement seulement.

La solution innovante d’utiliser un bateau présentait plusieurs avantages : d’abord, elle permettait d’éviter une manutention supplémentaire qui aurait eu lieu dans le cas d’un transport en camion (les arbres auraient été stockés dans un dépôt avant d’être ensuite réinstallés dans des camions) ; de plus, la place disponible dans la péniche permettait de leur offrir plus d’espace, évitant de les abîmer ; enfin, installés au fond de la cale fermée du bateau, les courants d’air ont été réduits par rapport au transport routier, empêchant une fois encore leur dessèchement. Et l’ensoleillement alors ? Les arbres étant en période de repos végétatif de novembre à mars, l’absence de lumière ne leur a pas été préjudiciable.

La plantation définitive des arbres

La société Thierry Muller a assuré leur déchargement avant de les mettre en jauges en couvrant leurs mottes de sable afin de garantir une continuité d’humidité et de les préserver du dessèchement à l’air libre, jusqu’au moment de la plantation. Un arrosage régulier complémentaire permet de conserver ainsi les arbres pendant plusieurs semaines.

Autre facteur important lors du procédé de plantation d’arbres : la saisonnalité. A l’échelle de l’Eurométropole, et traditionnellement partout ailleurs, la plantation s’effectue de mi-octobre à mi-mars, mi-avril maximum. Ces quelques mois correspondent au repos végétatif durant laquelle leur croissance est temporairement arrêtée, avant de reprendre à l’arrivée du printemps avec le phénomène de montée de sève. Il est préférable pour l’arbre d’être planté avant la montée de sève qui marque une nouvelle croissance de l’arbre, la sève irriguant les différents organes de l’arbre pour lui apporter les nutriments nécessaires à son développement. Un arbre non-planté à cette période, ne pouvant se nourrir de la terre, pourrait malheureusement mourir.

Et maintenant ?

La situation exceptionnelle de ces derniers jours a conduit dans un premier temps à l’arrêt total de cette opération pour préserver la santé de celles et ceux impliqués. Grâce à leur mise en jauge, les arbres auraient pu aisément tenir quelques temps, entre 1 et 2 mois. Un compte à rebours indépendant de notre volonté avait alors démarré, mais les équipes de la société Thierry Muller ont repris progressivement la plantation des arbres sur Citadelle Sud avec toutes les précautions d’usages, laquelle sera terminée cette semaine.


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